Le don de Dieu (suite)

(Suite)

– Alors, Monseigneur, demandai-je, pourquoi n’allons-nous pas à

Jésus et à Lui Seul? Pourquoi enseignons-nous aux malheureux
pécheurs qu’ils doivent aller à Marie, alors que, vous-même
venez de le confesser, elle n’est rien comparée à Jésus,
ni en puissance, ni en miséricorde, ni en amour, ni en compassion
pour les pécheurs?

Le pauvre évêque ressemblait à un condamné à
mort. Il tremblait devant moi, et il invoqua une affaire urgente devant moi,
pour me laisser. L’affaire en question était qu’il ne savait pas me
répondre.

Je n’étais toutefois pas encore converti, loin de là! Il y
avait encore beaucoup de liens qui me retenaient attaché aux pieds
du pape. Il y avait d’autres batailles à livrer avant que je puisse
briser mes chaînes! Et, bien que je fusse troublé, je n’avais
rien perdu de mon zèle pour “mon” Église. Les
évêques m’avaient donné une grande autorité et
de grands pouvoirs, le pape m’avait élevé au-dessus de beaucoup
d’autres, et j’avais l’espoir, comme beaucoup l’ont, que petit à petit,
nous pourrions réformer l’Église en beaucoup de points.

En 1851, je partis pour l’Illinois afin d’y fonder une colonie de Canadiens
Français. J’emmenai avec moi 75000 personnes et installai la colonie
sur les magnifiques prairies de l’Illinois, prenant possession de ce terrain
au nom de l’Église Romaine.

Mon travail de colonisateur fit de moi un homme très riche. J’achetai
beaucoup de Bibles et en offris une à presque chaque famille.
L’évêque était très mécontent de moi à
cause de cela, mais je ne me préoccupai pas de ce mécontentement.

Je n’avais pas la moindre idée de renier l’Église Romaine,
mais je voulais diriger mon Troupeau du mieux possible dans la voie dans
laquelle Jésus-Christ désirait me voir les conduire.

Il advint que l’évêque de Chicago fit à cette époque
une chose que nous, Français, ne pûmes tolérer. C’était
une action criminelle, et j’écrivis au pape et obtins sa déposition.
Un autre évêque fut nommé à sa place, lequel me
délégua son Vicaire Général. Le Vicaire
Général me dit :

– M. Chiniquy, nous sommes tous très heureux que vous ayez fait
déposer cet évêque qui était un homme vil. Mais
dans beaucoup d’endroits on s’imagine que vous n’êtes plus dans
l’Église Romaine. On vous suspecte d’être un hérétique
et d’être devenu protestant. Ne voudriez-vous pas nous donner une
déclaration qui nous permette de prouver dans le monde entier que
vous et vos gens êtes toujours de bons catholiques romains?

– Je n’y ai pas d’objection, répondis-je.

Il ajouta que c’était le désir personnel du nouvel
évêque d’avoir un tel document émanant de moi. Je pris
une feuille de papier, et il me sembla que j’avais là une occasion
unique de réduire définitivement au silence la voix qui me
parlait jour et nuit et troublait ma foi. Je voulus, par ce moyen, me persuader
moi-même que dans l’Église Catholique Romaine, nous suivions
réellement la Parole de Dieu, et pas seulement des traditions d’hommes
J’écrivis donc exactement ce qui suit : “Monseigneur, nous Canadiens
Français de la Colonie de l’Illinois, voulons vivre dans la Sainte
Église Romaine, Catholique et Apostolique, hors de laquelle il n’y
a point de salut. Et pour prouver ceci à votre Excellence, nous promettons
de nous soumettre à votre autorité, en suivant la Parole de
Dieu telle que nous la trouvons dans l’Évangile du Christ.”

Je signai ce papier et l’offris à la signature de mes gens, ce qu’ils
firent. Je remis ensuite le document au Vicaire Général, lui
demandant ce qu’il en pensait. Il dit: C’est exactement ce que nous
désirions. Il m’assura que l’évêque accepterait cette
déclaration et que tout serait en règle.

Lorsque l’évêque eut lu l’acte de soumission, lui aussi le trouva
correct et avec des larmes de joie, il dit: “Je suis heureux que vous
ayez déclaré votre soumission, car nous avions tous la crainte
que vous et votre colonie ne deveniez Protestants !”

Chers amis, pour vous prouver mon aveuglement, je dois vous confesser à
ma honte que j’étais heureux d’avoir fait la paix avec
l’évêque, un homme alors qui ne l’avait pas faite avec Dieu.
L’évêque me donna une “Lettre de Paix” dans laquelle
il déclarait que j’étais l’un de ses meilleurs prêtres,
et je retournai vers mes concitoyens bien déterminé à
en rester là. Mais Dieu me regardait avec Sa pitié
miséricordieuse, et Il s’apprêtait à briser cette paix
avec l’homme et non avec Lui.

Après mon départ, l’évêque se rendit au bureau
du télégraphe, d’où il télégraphia mon
acte de soumission aux autres évêques en leur demandant leur
opinion. Ils lui répondirent tous le même jour et avec
unanimité:

– Comment ne voyez-vous pas que Chiniquy est un Protestant
déguisé, et qu’il a fait de vous un Protestant ? Ce n’est pas
à vous qu’il se soumet, c’est à la Parole de Dieu! Si vous
acceptez cet acte de soumission, vous devenez vous-même un protestant!

Dix jours plus tard, je fus convoqué par l’évêque. Et
lorsque je fus devant lui, il me demanda si j’avais sur moi la Lettre de
Paix qu’il m’avait remise à ma précédente visite. Je
sortis la lettre, et lorsqu’il eut constaté que c’était bien
l’original, il courut à la cheminée et la jeta dans le feu.
J’étais stupéfait et me précipitai pour sauver ma lettre,
mais il était trop tard, elle était consumée. Je me
tournai alors vers l’évêque et dis:

– Comment osez-vous, Monseigneur vous emparer d’un document qui est
ma propriété, et le détruire sans mon consentement ?

– M. Chiniquy, répliqua-t-il, je suis votre supérieur,
je n’ai pas de comptes à vous rendre.

– Vous êtes en effet mon supérieur, Monseigneur,
répliquai-je, et je ne suis moi qu’un pauvre prêtre, mais il
y a un Grand Dieu, qui est au-dessus de vous et de moi, et ce Dieu m’a
donné des droits que je ne renierai jamais pour plaire a un homme
quel qu’il soit. En présence de ce Dieu je proteste contre votre
iniquité.

– Êtes-vous venu ici pour me faire la leçon, dit-il ?

– Non, Monseigneur, répliquai-je, mais je désire savoir
si c’est pour m’insulter que vous m’avez fait venir ici.

– M. Chiniquy, répondit–il, je vous ai fait venir parce
que vous m’avez remis un document dont vous saviez fort bien que ce n’était
pas un acte clé soumission.

– Faites-moi donc savoir quel acte de soumission vous requérez
de moi!

– Vous devez commencer par supprimer le mots: “…suivant la Parole
de Dieu telle que nous la trouvons dans l’Évangile du Christ”,
puis écrire simplement que vous promettez d’obéir à
mon autorité sans aucune condition, et que vous promettez de faire
quoi que ce soit que je vous dise de faire.

Je me dressai et dis:

– Monseigneur, ce que vous me demandez là ce n’est pas un acte
de soumission, c’est un acte d’adoration! Je vous le refuse!

– Eh bien alors, dit-il, si vous ne pouvez me donner un tel acte de
soumission, vous ne pouvez être plus longtemps un prêtre catholique.

Je levai les mains vers Dieu et m’écriai:

– Dieu Tout Puissant, sois à jamais béni! Et prenant mon
chapeau, je quittai l’évêque.

Je retournai à ma chambre d’hôtel, fermai la porte à
clé, et tombai à genoux pour examiner en présence de
Dieu l’acte que je venais d’accomplir.

Je vis alors clairement pour la première fois de ma vie que l’Eglise
Romaine ne pouvait pas être l’Eglise de Christ. J’avais appris la terrible
vérité, non pas des lèvres des Protestants, non pas
de ses ennemis, mais de l’Église Romaine elle-même. Je vis que
je ne pouvais y demeurer qu’à condition de renier la Parole de Dieu
dans un document officiel. Alors je reconnu qu’il valait mieux renier
l’Église Romaine. Mais, oh mes amis, quel épais nuage
s’étendait maintenant autour de moi. Dans mes ténèbres
je priais:

“Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi mon âme est-elle entourée
d’un nuage si sombre ? ” Avec larmes, je criai à Dieu de me montrer
le chemin, et pendant un moment, aucune réponse ne me vint. J’avais
quitté l’Église Romaine, j’avais renoncé à ma
position, à mon honneur, à mes frères et soeurs, à
tout ce qui m’était cher!

Je voyais d’avance comment le Pape, les évêques, les prêtres
allaient m’attaquer dans la presse et du haut de la chaire, comment ils
essaieraient de m’ôter l’honneur, le nom et peut-être la vie.

Je comprenais qu’une guerre sans répit avait maintenant commencé
entre l’Église Romaine et moi, et je cherchais si quelque ami me restait
pour être à mes côtés dans cette bataille. Mais
je n’en vis pas un, car je savais que même mes amis les plus chers
seraient dans l’obligation de me maudire et de me considérer comme
un traître infâme. Je voyais mon peuple me rejeter, et ma patrie
bien-aimée, où je comptais tant d’amis, me maudire; je comprenais
que j’étais devenu un objet d’horreur pour le monde. J’essayai alors
de me rappeler si j’avais quelque amitié parmi les Protestants. Mais
j’avais tellement parlé et écrit contre eux ma vie durant que
je n’avais pas un seul ami parmi eux. Je me vis bien seul dans la bataille.

C’en était trop et si, en cette heure terrible, Dieu n’avait
pas fait un miracle, je n’aurais pu résister. Il me semblait impossible
de sortir de cette chambre pour entrer dans un monde glacé où
je ne trouverai plus une main pour serrer la mienne, ou un seul visage pour
me sourire, mais où je ne rencontrerai que les regards qu’on jette
sur les traîtres.

Il semblait que Dieu était bien loin, mais Il était bien
près. Soudain, la pensé me traversa: “Tu as ton
Évangile, lis-le, tu y trouveras la lumière!” Agenouillé
et la main tremblante j’ouvris le livre – ou plutôt ce ne fut
pas moi qui l’ouvris mais Dieu, car voici le verset sur lequel mes yeux
tombèrent: “Vous avez été rachetés à
grand prix, ne devenez pas esclaves des hommes!” (1°épître
Corinth. ch.7. v.23). Avec ces mots, la lumière entra en moi et pour
la première fois je vis le grand mystère du salut dans la mesure
où un homme peut le voir. Je me dis:

“Jésus m’a acheté, donc si Jésus m’a acheté,
Il m’a sauvé: je suis sauvé! Jésus est mon Dieu. Toutes
les oeuvres de Dieu sont parfaites. Je suis donc parfaitement sauvé!
Jésus ne peut pas me sauver à moitié. Je suis sauvé
par le sang de l’Agneau, je suis sauvé par la mort de Jésus.”

Ces mots me furent si doux que j’éprouvai en les prononçant
une joie indicible, comme si les sources de vie s’étaient ouvertes
et des flots de lumière nouvelle inondaient mon âme. Je me dis:

“Non je ne suis pas sauvé, comme je l’avais cru, en passant par
Marie, ni en allant expier moi-même dans un “purgatoire”,
ni par la confession, ni par les indulgences et les pénitences. Je
suis sauvé par Jésus Seul !”

J’éprouvai alors une joie telle, une telle paix, que les anges de
Dieu ne peuvent pas être plus heureux que je ne l’étais. Le
sang de l’Agneau ruisselait sur ma pauvre âme pécheresse. Avec
un profond cri de joie je priai: “ Ô Jésus Bien-Aimé,
je le sens, je le sais, Tu m’as sauvé. Ô Don de Dieu, je T’accepte.
Prends mon coeur et garde-le à jamais à Toi! Don de Dieu, demeure
en moi pour me rendre pur et fort, demeure en moi pour être mon chemin,
ma lumière et ma vie. Accorde-moi de demeurer en Toi maintenant et
pour toujours. Mais, Jésus Bien-Aimé, ne me sauve pas seul!
sauve mon peuple! Accorde-moi de leur montrer le Don à eux aussi!
Oh puissent-ils t’accepter et se sentir riches et heureux comme je le suis
désormais moi-même.”

C’est ainsi que je découvris la lumière. J’avais ouvert mon
âme et accepté le Don. Vous n’avez rien à faire d’autre
que d’accepter ce Don, l’aimer et aimer Celui qui le donne.

Le dimanche matin, la foule se rassemblait dans l’Église, je leur
présentai le DON. Je leur montrai ce que Dieu m’avait
présenté: Son Fils Jésus comme un Don – et en
Jésus, le pardon de mes péchés et la vie éternelle
comme un Don. Alors ne sachant pas s’ils accepteraient le Don ou non, je
leur dis: “Maintenant, mes amis, l’heure est venue pour moi de vous
quitter. J’ai quitté pour toujours l’Église Romaine. J’ai pris
le Don de Christ. Si vous pensez qu’il vaut mieux pour vous suivre le pape
que suivre Christ et invoquer le nom de Marie plutôt que Celui de
Jésus, afin d’être sauvés, faites-le moi savoir en vous
tenant debout.”

A mon immense surprise, toute la multitude demeura assise, remplissant
l’édifice de sanglots. Je pensais que quelques-uns d’entre eux me
diraient de m’en aller, mais pas un seul ne le fit. Comme je les observais,
je vis un changement se produire en eux, un merveilleux changement qui ne
peut s’expliquer de manière naturelle, et je leurs dis dans un cri
de joie: “Le Dieu puissant Qui m’a sauvé hier peut vous sauver
aujourd’hui! Avec moi, vous traverserez la mer rouge et vous entrerez dans
la Terre Promise: avec moi vous accepterez le Grand Don, et vous serez riches
et heureux en ce Don!Je vais vous poser la question sous une meilleure forme;
si vous pensez qu’il vaut mieux pour vous suivre le Christ que suivre le
pape, et invoquer le nom de Jésus Seul qu’invoquer celui de Marie,
qu’il est meilleur pour vous de mettre votre confiance seulement dans le
sang de l’Agneau répandu sur la croix pour vos péchés
plutôt que dans le Purgatoire imaginaire après votre mort, et
si vous pensez qu’il vous est préférable de m’avoir, moi qui
désormais prêcherai le pur Évangile de Christ, plutôt
que d’avoir un prêtre qui vous prêche les doctrines de Rome,
faites-le moi savoir en vous levant !” Et tous sans exception se
dressèrent sur leurs pieds et avec des larmes me demandèrent
de rester avec eux. Et les mots seraient incapables de décrire la
joie de cette multitude. Les noms d’un millier d’âmes furent inscrits
dans le Livre de Vie.

Six mois plus tard, nous étions deux mille convertis. Un an plus tard,
environ quatre mille, et maintenant nous sommes près de 25000 qui
avons blanchi nos robes dans le sang de l’Agneau. La nouvelle se répandit
à travers tout le continent américain et même en France
et en Angleterre que Chiniquy, le prêtre le plus connu du Canada avait
quitté l’Église Romaine à la tête d’une noble
compagnie d’hommes. Partout, le nom de Jésus-Christ fut béni
et vous bénirez avec moi le Sauveur adorable et miséricordieux,
maintenant Que je vous ai raconté ce qu’Il a fait pour mon âme.

Mission Maranatha, Mont-Tendre 3

1400 YVERDON Suisse

C. Chiniquy a raconté sa vie d’une manière beaucoup plus
détaillée

dans son livre intitulé “Mon combat”. Cette biographie a
été rééditée sous un autre titre:
“Chiniquy”.

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mai 8th, 2018 by